Gestion pilotée : bilan 2019 et perspectives 2020

  1. Charles-Henri Kerkhove
  2. Directeur des Investissements au sein de l’équipe Multi-Asset
  3. Fidelity International
Dans un environnement où le comportement des marchés financiers dénote avec les standards historiques, comment la société de gestion Fidelity International, en charge de la gestion pilotée disponible chez Assurancevie.com, a-t-elle adapté sa stratégie ? Le point avec Charles-Henri Kerkhove, directeur des Investissements au sein de l’équipe Multi-Asset de Fidelity.

Interview achevée de rédiger le 30 janvier 2020 / Mise à jour le 9 mars 2020

Quel bilan dressez-vous de l'année 2019 ?
Charles-Henri Kerkhove : Tout d’abord, il faut souligner que l’année a été assez mouvementée sur les plans marcroéconomique et géopolitique. En effet, nous avons été confrontés à un clair ralentissement économique en Europe mais également à un essoufflement en Chine, et par voie de conséquence dans les pays émergents de manière plus générale. En parallèle, les négociations autour de l’accord commercial entre les États-Unis et la Chine, autour du Brexit, l’attaque d’installations pétrolières en Arabie-Saoudite… ont créé quelques remous. Bref, l’environnement, à première vue, pouvait laisser les investisseurs pessimistes.

Mais après la forte correction qui avait eu lieu lors du dernier trimestre 2018, le point d’entrée était intéressant début 2019, permettant aux valeurs d’enregistrer des performances notables sur une année. Et la politique menée par les Banques centrales a permis un regain de confiance des investisseurs.

Toutefois, ce qui est pour nous marquant, et ce qui rend plus compliquée l’approche de gérants de fonds diversifiés comme nous, c’est que 2018 avait été une année exceptionnelle dans le sens où aucune classe d’actifs n’avait réussi à finir l’année dans le vert (à part le dollar et les obligations d’État allemand), alors qu’à l’inverse, en 2019, chacune d’entre elles affiche une performance positive ! Ainsi, en 2018 les investisseurs n’avaient nulle part où protéger les actifs. Et l’année dernière, autant les actifs à risque que les actifs défensifs ont progressé. Force est donc de constater une forte hausse de corrélation entre les performances des différentes classes d’actifs. Il n’y a en effet en principe pas de raison qu’aussi bien les obligations d’États, que l’or et les marchés actions évoluent dans le même sens. Cette situation inhabituelle est principalement liée à l’influence, un peu perturbatrice, des Banques centrales.

Nous faisons donc face à un environnement où les fondamentaux économiques, les nouvelles géopolitiques et les risques qui y sont liés sont écrasés par le rouleau compresseur des politiques monétaires des Banques centrales.
COMMENT ABORDEZ-VOUS L’ANNÉE 2020, ALORS QU’ELLE A DEBUTÉ AVEC DES MARCHÉS PROCHES DE LEUR PLUS HAUTS HISTORIQUES AVANT DE CONNAîTRE UNE FORTE CORRECTION DUE À L’ÉPIDÉMIE DE CORONAVIRUS ? COMMENT NAVIGUEZ-VOUS DANS CE CONTEXTE ?
Charles-Henri Kerkhove : Il est encore trop tôt pour mesurer l‘impact du coronavirus sur la croissance mondiale mais c’est clairement un élément perturbateur. Cependant si l’on prend l’exemple de l’impact de la crise du SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) en 2003 on a noté une surréaction importante des marchés qui s’est avérée être un point d’entrée particulièrement intéressant pour les investisseurs.

Pour ce qui est de la valorisation des marchés boursiers en début d’année, qui était certes proche des plus historiques, l’analyse doit être fine, car il y a une distinction régionale à faire. Par exemple le S&P 500, c’est-à-dire le marché actions américain, hors dividendes, a doublé depuis son dernier niveau record, atteint en 2007, juste avant le déclenchement de la crise financière. Alors que si l’on regarde le marché des actions européennes, en prenant comme exemple l’indice EuroStoxx 50, on est encore à un niveau inférieur aux records atteints en 2000 et 2007. Il est donc important de relativiser selon les zones géographiques : si les marchés américains ont performé de façon exceptionnelle sur cette période, portés notamment par le secteur des nouvelles technologies (Google, Facebook…), l’histoire est malgré tout différente sur le vieux-Continent, plus orienté vers les secteurs télécoms, financiers, etc.

En termes de perspectives pour 2020, nous avons une préférence pour l’Europe, l’Asie et les marchés émergents. Cela se justifie, comme nous venons de le voir, de par le différentiel de performance que ces zones ont connu ces dernières années par rapport au marché américain ainsi que les niveaux de valorisation.

Nous sommes par contre prudents sur les classes d’actifs des obligations d’États (notamment européens) et des obligations d’entreprises (notamment celles de haute qualité) au vu de leurs valorisations et de l’impact disproportionné sur leurs cotations que pourrait avoir un message maladroit de la part des Banques centrales.

Nous nous attendons certes à plus de volatilité sur les marchés en 2020, pour autant, nous n’anticipons pas, à court/moyen terme, de changement dans la politique des Banques centrales.

En résumé, d’après nous, deux facteurs sont importants en 2020 : l’évolution de la croissance chinoise et le maintien de la politique des Banques centrales.
Quels sont les autres éléments de tension pour les marchés à surveiller en 2020 ?
Charles-Henri Kerkhove : Depuis le début de l’année, les marchés ont très vite absorbé l’impact d’un risque de conflit entre les États-Unis et l’Iran, tout simplement parce qu’il y a encore ce facteur de support des Banques centrales. Les investisseurs ont donc parfois tendance à porter trop attention aux nouvelles géopolitiques.

Le risque macroéconomique principal cette année est la tension sur l’inflation. Car un retour de celle-ci pourrait être interprété par les marchés comme un signe avant-coureur de hausse des taux, surtout lorsqu’on fait face à un marché de l’emploi tendu dans un certain nombre de pays (États-Unis, Grande-Bretagne, Allemagne…). De plus, ce que l’on ressent également aujourd’hui, c’est que les Banques centrales passent le relai aux gouvernements, ce qui pourra être synonyme de relâchement fiscal et par voie de conséquence d’inflation. Selon nous, le marché sous-estime aujourd’hui ce risque.

Enfin, plus tard dans l’année, un autre élément perturbateur pourra faire son entrée : les élections présidentielles aux États-Unis. Il est possible que le marché américain interprète de façon négative l’éventuelle montée en puissance d’un candidat démocrate dont le programme serait fortement orienté à gauche. Car en effet, une grande partie de la bonne performance des actions américaines au cours de ces dernières années a été permise par les baisses d’impôt sur les sociétés. L’arrêt de ce boost fiscal pourrait avoir un impact sur les marchés financiers.
Quelles zones géographiques privilégiez-vous en ce début d'année 2020 ? Et au contraire, quelles sont celles dont vous vous détournez ?
Charles-Henri Kerkhove : Forts du constat que la corrélation classique entre classes d’actifs est actuellement biaisée, nous ne nous tournons pas vers les actifs historiquement reconnus comme étant défensifs (obligations allemandes, dollar américain, franc suisse…).

Pour la poche prudente de nos portefeuilles, nous allons donc plutôt nous orienter vers la dette émise par les pays émergents, qui est certes traditionnellement plus risquée, mais dont la valorisation et la devise sont à des niveaux attrayants.

Autres classes d’actif retenues dans notre stratégie : les actions émergentes et les small caps (actions de petites et moyennes entreprises). En effet, nous estimons que la Chine a encore une marge de manœuvre pour implémenter des plans de relance, et que cela sera moteur pour les autres pays émergents, notamment en Asie. Côté small caps, nous pensons que leurs valorisations sont attractives, car tout un segment de ce marché, quelle que soit la zone géographique, est resté un peu à la traîne ces dernières années.

À l’inverse, nous réduisons notre exposition aux actions américaines, pour les raisons évoquées précédemment.

Pour conclure, la construction des allocations va donc devoir se faire en étant sélectif et en restant ouvert à certaines niches d’investissement.

AVERTISSEMENT : Les unités de compte comportent un risque de perte en capital. Il n’existe pas de garantie en capital des sommes investies sur ces supports. L’assureur ne s’engage que sur le nombre d’unités de compte mais pas sur leur valeur. La valeur de ces unités de compte n’est pas garantie mais sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse, dépendant en particulier de l’évolution des marchés financiers.

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Mis à jour le 09/03/2020

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